Avant même d'avoir un enfant, j'ai toujours été une grosse angoissée de la vie.
Les loups que je croyais voir rôder autour de mon lit la nuit quand j'avais 10 ans se sont petit à petit transformés en angoisses plus réelles, et plus effrayantes.
Je me suis toujours dit : les horreurs, ça n'arrive pas qu'aux autres, c'est au moment où je vais arrêter de me méfier qu'il va m'en tomber une sur le coin du pif que je n'aurais même pas vu venir.
Au quotidien, mes peurs restent le plus souvent au repos, elles siestent tranquillement avant de revenir en force la nuit, glissant insidieusement sous les portes et dans les interstices des fenêtres, pour venir se lover dans la goutte de sueur qui coule le long de mon dos.
En revanche, en maison, même en terrain connu (et même pas forcément en terre inconnue, ahah oui je sais j'ai mangé un clown). Le moindre craquement ou bruit suspect est sujet à interprétation et mon imagination fait le reste.
Je descends le volet roulant et j'imagine que quelqu'un m'observe depuis le gouffre noir du jardin, je le rouvre et je voie une paire de chaussures noires dans l'herbe (avec les pieds et les mollets qui vont avec hein), tétanisée d'ouvrir le volet davantage ; je trouve la maison trop calme et bam je m'imagine que d'un coup, une musique va se lancer à fond, signe que quelqu'un est dans la maison mais où et quelles sont ses intentions, personne ne le sait, etc.
En maison donc, la nuit, je dors peu et souvent assez mal.
J'ai souvent dit à l'Homme que j'étais quelqu'un d'angoissé mais je me souviens de la première fois que je lui ai détaillé explicitement mes peurs : j'avais lu le désarroi total dans son regard et je m'étais rendue compte que non, je ne pouvais pas résumer mon problème par "je suis une poule mouillée". Mon cerveau est beaucoup plus imaginatif que ça.
Ces peurs me paralysent et me rendent incapables d'accomplir des actes aussi bête qu'aller boire un verre d'eau dans la cuisine si j'ai soif. Oui je sais, c'est idiot.
En mai dernier, nous sommes partis une semaine dans une maison familiale avec le fiston. Nous nous sommes ainsi retrouvés tous les trois plusieurs nuits dans un grand logement vide.
Non, mes angoisses ne se sont pas envolées comme par magie, elles sont toujours là, mais alors qu'avant, dès la nuit tombée, elles hurlaient dans mes oreilles, maintenant elles ne font plus que chuchoter, j'ai le sentiment de les maîtriser et d'être en mesure, petit à petit, de les faire se taire complètement un jour.
Finalement, le fait d'avoir quelqu'un qui compte énormément sur moi, qui dépend de moi, m'a mise au pied du mur.
En plus d'apaiser les peurs de mon enfant, les miennes doivent s'effacer pour qu'il ne les ressente pas. Alors oui, mes angoisses, elles sont reléguées dans un petit coin minuscule de ma tête : la nuit je chasse ses monstres et je descends les volets en sifflotant.
C'est merveilleux me direz-vous mais avec sa naissance, même si mes démons de minuit ont disparu (ou plutôt bien reculé), d'autres ont fait leur apparition (pas drôle sinon). On va les appeler mes démons de midi.
Là où il n'y a pas si longtemps, je n'angoissais jamais en journée, je ne peux maintenant pas m'empêcher de partir au quart de tour au moindre micro-problème, à partir du moment où cela concerne le fiston.
Ainsi, il y a quelques semaines, quand Bonne Fée (qui garde le fiston en journée) m'a appelée pour me dire que le fiston avait de la fièvre, d'énormes plaques rouges sur le corps et était complètement groggy, mon sang n'a fait qu'un tour. J'imaginais déjà une allergie alimentaire, son système respiratoire qui gonfle jusqu'à l'empêcher de respirer, un terrible coup de fil qui me tire du travail et me lance, courant à toutes jambes, jusqu'à chez moi, poussant la porte et découvrant l'indécouvrable. Ce cauchemar, je pouvais le voir de façon très nette, presque comme si je le vivais... tout ça pour un urticaire viral bête comme chou.
Imagination, je te déteste.
Cette semaine, elle m'a d'ailleurs rejouée un sale tour.
Bonne Fée devait garder le fiston chez nous ce jour-là. Seulement voilà, à 18h quand l'Homme arrive à l'appartement, personne n'est là. Il m'envoie un SMS que je sens un peu inquiet, et même si mon imagination ne demande qu'à galoper, je ne m'en fais pas.
Quand j'arrive chez nous 20 minutes plus tard, l'Homme est toujours seul à l'appart, le nez collé contre la vitre à scruter les passants. Je comprends qu'il a sûrement passé les 20 dernières minutes à la fenêtre.
Mes démons de midi grattent à la porte comme des malades, ils ne demandent qu'à entrer. Je les ignore superbement et suis ma petite logique posément : ils sont sûrement encore en vadrouille, ils n'ont pas vu l'heure, je vais passer un petit coup de fil.
Les démons de l'Homme titillent les miens et ne lâchent rien : oui, mais... ça n'est jamais arrivé à Bonne Fée avant, elle prévient toujours, en plus il pleut, pourquoi seraient-ils encore en train de se promener ? et pourquoi elle ne répond pas au téléphone ?
Bien qu'inquiète, je tente de pondérer un maximum, 1 000 explications rationnelles et rassurantes vs un film horrifique dans ma tête.
À 18h40, je vois que l'Homme ne tient plus : je lui dis d'aller faire un tour aux parcs du coin pour voir s'ils n'y sont pas. Il bondit du canapé comme un diable hors de sa boîte, attrape une veste et jaillit hors de l'apart... pour remonter moins d'une minute plus tard avec Bonne Fée et le fiston, croisés dans le hall de notre immeuble : ils s'étaient fait surprendre par la pluie et s'étaient abrités à la bibliothèque.
Ces peurs diurnes, je dois apprendre à les étouffer seule. Je dois les vaincre cette fois-ci pas pour le fiston, mais pour l'Homme. Parce que l'Homme, même s'il n'a pas de démons de minuit, a des démons de midi bien plus coriaces que les miens, qui lui hurlent dans les oreilles.
Je veux être là pour lui, faire le tour du lit pour chasser ses loups, fouiller la maison pour faire fuir ses peurs, même si moi aussi elles me clouent sur place.
Et je sais que j'y arriverais parce que l'Homme doit pouvoir compter sur moi.
Et vous alors, plutôt démons de midi ou démons de minuit ?
Je te DÉTESTE !!!! J'ai une confiance aveugle dans le monde et donc mon imagination ne me monte pas de plan aussi horrible que la tienne, mais une fois qu'on m'évoque l'idée, je psychote aussi ! En plus l’allergie alimentaire, ma mère et le Chti l'ont argh ! Pas merci dis !
RépondreSupprimerJe suis plutôt diurne quand il s'agit de Plume et du Chti, la nuit je dors comme un loir (mais des bruits trop suspects et j'envoie le Chti regarder ahem)
PS; j'imagine bien la tête de ton mari quand tu lui as raconté la première fois, je me marre :P
Désoléééé ^^'
SupprimerJe n'ai pas trop trop de démons, juste quelques de minuit, mais seulement quand je suis seule à la maison. Du coup je ferme toutes les portes à quadruple tours. Et je laisse le chien dormir avec moi.
RépondreSupprimerPar contre, imagine quand Iroise commence à fixer l'escalier / la porte / la fenêtre / le vide en grognant et a le dos qui s'hérisse... Le pire c'est que je dois moi la rassurer en lui disant qu'il n'y a rien pour qu'elle se calme. Mais si il y avait quelque chose ? :o
La vache, j'aurais un chien qui me ferait la même je serai terrorisée :\
SupprimerHaha! J'adore ton article. Je m'y retrouve pleinement.
RépondreSupprimerAngoissée de nature, j'ai plutôt des démons de minuit!
Quand Monsieur travaillait de nuit et que je me retrouvais seule à la maison, je m'endormais à pas d'heure et seulement avec la lumière du couloir allumée... Oui comme les gosses.
Mais venant d'une famille nombreuse, et ayant été dans la même chambre que ma soeur jusqu'à mes 18 ans, les soirées seules dans un appartment sans ma famille ni Monsieur, et bah c'était pas joli joli!
Du coup 1 an après j'ai négocié un petit chien pour me tenir compagnie les longues soirées d'hiver!
Qui maintenant comme le dit Caro Dels, ne me rassure pas vraiment quand il se met à grogner le soir quand moi même je n'entends pas un bruit...
Oulala je te comprends, j'aurais été seule pour dormir face à mes démons de minuit, j'aurais allumé la lumière aussi !
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